On ne prête qu'aux riches
Vous avez remarqué ?
Tout comme il est beaucoup plus simple de gagner de l'argent quand on a de l'argent, il suffit d'être dans une relation de couple pour se faire à nouveau draguer par les filles.
Non, mais c'est dingue, non ?
Cela facilite naturellement considérablement l'approche "portefeuille" que nous avons déjà longuement recommandée dans cet ouvrage. Et puis cela fait toujours plaisir.
Mais enfin pourquoi, ô mon Dieu pourquoi !?
Ou, comme disait Wagner, "Aber Warum, Ô mein Gott, warum !?".
Mais non, pas Richard Wagner, Otto Wagner, il bosse au Aldi de Kaiserslauternskirschenrhenserstadt, et ce matin son lecteur code-barre est tombé en carafe en plein inventaire du rayon choucroute, on peut comprendre son désarroi.
Même si en l'occurrence sa détresse avait un caractère nettement moins philosophique que la mienne, on ne peut pas trop attendre des allemands. Sinon on est déçu.
Je ne pense pas qu'il ait un lien de parenté significatif avec Richard.
Non, je ne lui demanderai pas la prochaine fois que je le verrai.
Ah bon, parce que vous, vous savez peut-être comment on dit "lien de parenté significatif" en allemand ?
Gros malin.
Où j'en étais ? Ah oui, why, but why ?
Un de mes amis avance une explication sociologique qui mérite d'être considérée : "les gonzesses, c'est toutes des salopes". Oui, cela expliquerait en effet le phénomène.
Nonobstant (yesss, j'étais sûr que j'arriverais à le placer), et même sans tenir compte du fait que le correcteur d'orthographe de Windows rejette expressément le mot "salopes" (Ca vous intéresse une petite digression sur le caractère très puritain du correcteur d'orthographe de Windows qui refuse "salope" et qui accepte "nonobstant" ? Non ? Sûr ? Bon, je continue, alors), je pense que nous pouvons identifier les causes possibles du phénomène avec plus de subtilité.
On peut par exemple avancer, et ceci constituera notre hypothèse numéro 1 (merci de prendre des notes), que l'état amoureux nous rend plus beaux et désirables, que le sexe rend notre peau douce comme la pêche et nos lèvres sensuelles comme des fruits de printemps.
N'importe quoi.
L'hypothèse numéro 1, c'est que de la daube.
L'état amoureux nous rend fébrile et tout fripé parce qu'on n'est pas repassé chez soi se changer, et en plus on manque de sommeil et on a la gueule de bois. Alors, hein, vraiment, l'hypothèse numéro 1, faut pas déconner.
Ou alors les filles de la compta aiment bien les hommes fripés et à l'œil injecté de sang, qui ont mal à la bite et ne se souviennent plus où est leur voiture, mais non, même si elles sont à la compta, il ne faut pas prendre les nanas pour des connes (enfin, pas dans ce chapitre ; sinon c'est le bordel).
Ou alors, c'est juste dans notre tête. Hypothèse numéro 2.
Je répugne à donner crédit à l'idée selon laquelle parfois, nous les mecs, on aurait l'impression de se faire draguer alors qu'en fait non, mais il faut envisager toutes les hypothèses (c'est un blog sérieux qui n'a déjà qu'une portée littéraire discutable et donc on va au moins blinder la rigueur scientifique) ; donc on pourrait concevoir que peut-être, rendu euphorique par le succès amoureux avec une partenaire que nous appellerons X, un mâle qui nous appellerons Y ait une impression illusoire sur les intentions profondes d'une autre personne que nous appellerons "Fille de la Compta", et qui serait réellement venu le voir dans son bureau pour cette histoire obscure de note de frais où manquent la moitié des justificatifs et au sujet de laquelle elle s'interroge sur les raisons qui vous ont fait acheter une Rolex sous prétexte de ne pas arriver en retard à un rendez-vous super important avec un client potentiel, à Juan-les-Pins un vendredi, et en plus vous avez dû voyager en première en avion parce que les trains étaient complets, et comme vous aviez emmené votre nouvelle assistante-stagiaire pour la former vous avez été obligé de rester tout le week-end et de dormir au Carlton pour amortir le voyage, et que c'est vraiment dommage que vous n'ayez pas pu voir ce client en fin de compte.
Peut-être que, malgré les difficultés que vit Y à s'imaginer que Fille-de-la-Compta (c'est son nom indien) puisse réellement attacher de l'importance à ces choses administratives, il serait un peu exagéré d'en conclure forcément qu'il s'agisse d'un prétexte pour venir vous draguer dans votre bureau.
Je vous laisse réfléchir.
Ben oui, ça ne tient pas debout.
Bien sûr qu'elle le drague.
Je prie Y de m'excuser pour avoir mis sa perspicacité en doute, c'était pour l'expérience scientifique. Désolé.
Profitons-en d'ailleurs pour établir le théorème suivant, qui n'a pas besoin de démonstration car il est évident : "une fille de la compta qui sort de son bureau est une grosse salope, et elle drague tout ce qui bouge".
Démonstration de l'absurdité de l'hypothèse 2 : ça ne peut pas être "juste dans notre tête", parce que justement, dans notre tête, en général, il n'y a rien. Surtout quand on est amoureux.
CQFD
Je vous avais dit que j'allais blinder la rigueur scientifique.
Bon, alors, qu'est-ce qui nous reste ?
Et bien il est possible que certaines femmes recherche précisément à séduire des hommes déjà engagés par ailleurs pour éviter une relation durable pour elles-mêmes.
C'est l'hypothèse numéro 4.
Non, je déconne, c'est la 3. On a vu la zéro = "toutes des salope", la 1 = "l'amour rend sexy", et la 2 = "c'est dans ta tête" (quand j'y pense, quelle imagination !).
Donc maintenant, forcément, c'est la 3.
Comment ça, vous n'aviez pas remarqué ? Je vous avais dit de prendre des notes, bordel (ah tiens, "bordel", il le prend, Windows de mes couilles… Et "couilles" aussi, d'ailleurs).
Hypothèse numéro 3, donc, un homme marié est la garantie d'une relation superficielle et sans engagement pour une femme machiavélique, hin hin hin.
Vous avez le vertige ? Moi aussi. L'idée qu'une femme mariée se comporte comme un homme, et nous drague comme un vulgaire objet sexuel, pire comme une gonzesse, cette idée serait de nature à me dégoûter de la race humaine. Je ne peux y croire.
Warum, oh warum, comme dirait Otto.
A moins que.
A moins qu'elles ne le fassent pas consciemment, et que ce soit un truc à la Ally McBeal du genre "je cherche l'homme idéal mais au fond de moi j'ai peur de souffrir alors je ne m'attache qu'à des hommes inaccessibles".
Ouais, ça ça leur ressemble assez, aux filles de la compta.
L'hypothèse 3b est retenue comme possible.
Au passage, je propose que nous intégrions dans notre protocole méthodologique ce critère objectif, selon lequel "si une hypothèse X tend à faire passer les femmes pour des connes, elle a des chances d'être vérifiée par la suite". On va gagner du temps.
Je sais, j'avais promis qu'on ne prendrait pas les filles pour des connes dans ce chapitre, mais la science avance et ne peut pas s'embarrasser de principes.
Et puis ça fait quand même du bien.
Enfin, je voudrais soumettre à votre jugement l'hypothèse qui a ma préférence personnelle, et qui est donc la numéro 4.
Putaiiiiiiiiiin, si, c'est la 4, recomptez vous-même, on ne va pas recommencer, je vous dis de prendre des notes, vous n'écoutez rien, vous fumez des pétards en lisant le bouquin, et ensuite vous n'arrivez pas à compter jusqu'à 4, enfin quoi faites un effort …
En plus je vous préviens, la 4 elle est un peu plus balèze que les autres (et en plus Windows accepte "balèze", moi je ne sais plus, je ne comprends plus cet univers, il n'y a plus aucun critère objectif dans ce monde où nous vivons désormais, c'est le royaume de l'arbitraire, même en orthographe, je crois que je vais pleurer).
Donc, 4, la mimésis.
Les femmes draguent les hommes en couple parce que la valeur d'un objet dépend du désir d'une autre pour le même objet.
Si une autre femme l'a trouvé intéressant, alors il est un objet de désir acceptable, et je le désire aussi.
Je deviens désirable parce que je suis désiré.
J'aime bien cette théorie.
Je sais, elle ne fait pas vraiment passer les femmes pour des connes.
Juste pour des être superficiels et vains qui aiment en troupeau comme elles achètent des lunettes Gucci ou Prada, par imitation.
Des petits oiseaux sans cervelle qui picorent toutes à la même écuelle tandis que d'autres miettes moisissent bêtement à quelques pas.
Où étiez-vous toutes quand j'étais seul et désespéré, vous qui aujourd'hui vous ingéniez à tester mon sens de la fidélité ?
Ne pouviez-vous répartir vos ardeurs dans le temps, quelques-unes hier, quelques-unes aujourd'hui, et les autres demain quand mon ciel amoureux sera plus orageux ?
Voyez-vous aussi clairement que moi que demain, vous ne me regarderez même plus, vous qui minaudiez tantôt en sachant mon cœur déjà pris ?
Il avait bien raison, mon ami de l'hypothèse zéro.
Toutes des salopes.